Beaucoup de communautés ont pris l’habitude de lire le “Cantiques des Cantiques” durant la fête de Pessa’h. Outre l’intimité décrite entre Dieu et notre Peuple, de façon imagée, il nous a paru intéressant de voir si nous pouvions déceler dans le chant du roi Salomon l’expression d’une réponse à cet amour prodigué.
Il n’y a pas de preuve de l’expression de l’amour de Dieu à notre égard plus évidente que la Sortie d’Egypte elle-même mais que pouvons-nous faire pour nous rendre dignes de cette affection ?
“Tu as séduit mon cœur, ô ma sœur, ma fiancée, tu as capté mon cœur par un de tes regards, par un des colliers qui ornent ton cou” (Chir Hachirim 4, 8). Comment avons-nous pu mériter de “capter” Son cœur ? Pourquoi l’évoquer à deux reprises ?
Nos Sages (Berachot 54a) nous enseignent combien il est important, au moment où nous proclamons Son unité, de l’aimer des deux parties de notre cœur, mû à la fois par l’inclinaison au bien et l’inclinaison au mal, à savoir que nous souhaitons Le servir de tout notre être. Certains de nos aïeux en Egypte, appréciant les propriétés bénéfiques de cette contrée, ont pu hésiter à vouloir la quitter, et pourtant cette minorité (1/5e) de notre Peuple a réussi à supplanter ce sentiment nostalgique, cette partie d’un cœur maladroit, qui nous laissait imaginer que “c’était bien là-bas”, pour suivre notre Bien-Aimé !
Ils étaient pour la plupart ignorants et pourtant leur amour intrinsèque pour Dieu était plus intense, et, d’un cœur réjoui, ensemble, ils sortirent de la geôle égyptienne. Ainsi nous enseigne le Midrash (Chir Hachirim Raba 4, 20) : “Tu as capté mon cœur, ô ma sœur, ma fiancée, tu as capté mon cœur”– proclame Dieu en S’adressant à nous. Comment avons-nous mérité un tel amour ? ” car tout notre cœur (les deux parties) poursuit le midrash, pourtant attaché à l’Egypte a su s’élever vers notre Bien-Aimé, en s’ offrant à Lui”. “Tu as capté mon cœur par un de tes regards”, par le sang de l’agneau pascal et le sang de la circoncision. “Par un des bijoux précieux qui ornent ton cou”, il s’agit de Moché, homme si précieux et si héroïque parmi tes Tribus”, grâce a qui cet amour a pu être exprime avec tant de vigueur.
Il arrive que notre force physique mal orientée s’apparente au mauvais penchant, mais utilisée à bon escient, elle devient non seulement nécessaire mais elle décuple aussi notre dévotion physique et spirituelle et renforce notre désir de servir notre Créateur.
Les deux instincts honorent alors à l’unisson Celui qui nous a fait sortir d’Egypte. “La libération d’Israël de l’Egypte restera pour l’éternité le printemps des nations”, enseigne le Rav Kook (“Megued Yera’him”, Maamarei Hareiya p.501).
Nous permettre de nous libérer de toute forme d’esclavage est un moment décisif et ce jusqu’à nos jours dans l’histoire de l’humanité. Hélas, il est ardu de se libérer des deux jougs visibles au quotidien, parmi les plus terribles maux que l’humanité ait connus : l’idolâtrie et la débauche.
Par le signe d’alliance et le sacrifice de l’agneau, nous clamons et reconnaissons devant Dieu que seul Lui régit l’Ordre de la Nature (en contradiction avec l’agneau, l’idole égyptienne) et que nos instincts vitaux souhaitent être invoqués uniquement pour sanctifier Son nom. Le pharaon ne pouvait que s’entêter à nous empêcher de sortir car l’idolâtrie et la dépravation furent les mamelles de la culture égyptienne. La tradition hébraïque s’insurge vigoureusement contre cela et notre Peuple, bien que n’étant pas méritant au moment de sa libération, en étant prêt à faire la circoncision alors qu’un long périple dans le désert l’attendait, en s’empressant de briser l’idole égyptienne, sans craindre la réaction possible des geôliers, a acquis le doux et agréable privilège de “capter le cœur” de Dieu. Qu’avec Sa bénédiction nous puissions en cette nuit du Seder ressentir cet amour et nous retrouver très vite dans Sa Demeure à Jérusalem !
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