Au moment où nous nous apprêtons à rentrer dans le mois de Heshvan, des sentiments mitigés apparaissent, d’un côté, les fêtes de Tishri, leur solennité, leur noble élévation et leur intense expression de joie sont déjà derrière nous, et l’hiver, que nous souhaitons pluvieux, s’offre déjà à nous.
Ces référents climatiques ne sont pas innocents et sont emplis, selon l’exégèse traditionnelle, d’une dimension profonde. En effet, après avoir eu le privilège de nous introduire dans le Palais du Roi, l’honneur de “L’introniser” (Rosh Hashana), d’”échanger” avec Lui face à face (Yom Hakipourim) et même de “L’accueillir tel notre Hôte” toute une semaine, en toute intimité, dans notre fragile demeure (Soukot) qui, sans Sa Présence constante, tomberait, sans aucun doute, en ruine, nous voici revenus à un quotidien presque “routinier” qui pourrait s’avérer dangereux…
Deux évènements essentiels cependant marquent notre mois et ce, malgré l’absence de festivités.
La demande de la pluie tout d’abord : dans une région comme la nôtre, combien cette denrée est rare et prépondérante. Le “Cohen Gadol” en pénétrant dans “Le Saint des saints”, le jour de kippour avait déjà prié la miséricorde divine en faveur de la pluie, c’est durant la fête de Sim’hat Torah que nous invoquons la capacite majestueuse de Dieu à faire tomber la pluie mais c’est seulement à partir du 7 Heshvan, qu’en nous tournant vers Lui nous espérons qu’Il accèdera à notre requête afin d’accroitre les précipitations sur notre Terre.
Le deuxième épisode qui a priori n’a pas de rapport est un évènement moins réjouissant puisqu’il s’agit du décès de Rachel, notre Matriarche, le 11 Heshvan après l’accouchement de son fils Benjamin. Comme il est dit (Berechit 35, 16-18) :
וַיִּסְעוּ מִבֵּית אֵל… וַתֵּלֶד רָחֵל, וַתְּקַשׁ בְּלִדְתָּהּ. וַיְהִי בְהַקְשֹׁתָהּ, בְּלִדְתָּהּ; וַתֹּאמֶר לָהּ הַמְיַלֶּדֶת אַל-תִּירְאִי, כִּי-גַם-זֶה לָךְ בֵּן. וַיְהִי בְּצֵאת נַפְשָׁהּ, כִּי מֵתָה… וַתָּמָת, רָחֵל; וַתִּקָּבֵר בְּדֶרֶךְ אֶפְרָתָה, הִוא בֵּית לָחֶם
“Ils partirent de Béthel ; … lorsque Rachel enfanta et son enfantement fut pénible Comme elle était en proie aux douleurs de cet enfantement, la sage-femme lui dit: “Ne sois pas inquiète, car c’est encore un fils qui t’arrive. Or, au moment de rendre l’âme, car elle mourut…Rachel mourut donc et fut ensevelie sur le chemin d’Éfrath, qui est Bethléem.”
Le Midrash (Yelkut Shimoni Chemot 162) rappelle à quelle date sont nés chacun des fils de Yaacov, aussi puisque Benjamin est né le 11 Heshvan, nous en déduisons que Rachel est décédée à cette date.
Cependant il serait envisageable, que cet évènement ait eut lieu au mois de Yaar, en considérant le mois de Nissan comme premier mois, tel qu’il l’est selon la Torah. En effet un autre midrash (piska rabati ch.3, 5), souligne que notre Mère décéda entre Pessah et Chavouot, on ne pourrait imaginer que Yaacov ait attendu six mois afin d’enterrer son épouse tant aimée !
Nous souhaiterions nous interroger tout d’abord sur la nécessité de distinguer, concernant la pluie, entre sa simple évocation et sa requête. D’autre part, pourquoi est-il si important d’évoquer avec autant de précision le décès de notre mère Rachel d’autant que cela n’est pas du tout explicite pour les autres matriarches ? En outre, existe-t-il un lien entre le décès de Rachel et la pluie ?
Au sujet de la pluie, il nous faut rappeler qu’après les festivités de Tishri, où notre Peuple s’était réuni ensemble, à Jérusalem, en l’honneur de Soukkot, chacun rentre désormais chez lui, même celui qui résiderait près de la zone frontalière la plus éloignée de notre Terre. S’inquiétant du sort de nos frères, nous serons prudents, afin de leur permettre d’arriver à destination “sec”, en décalant la demande de précipitations uniquement lorsque chacun aura retrouvé dignement son foyer, dans les meilleures conditions (Taanit 1,3).
La date du 7 Heshvan souligne la corrélation entre notre Peuple et chacune des parcelles de la Terre d’Israël. Durant l’Exil que nous avons traversé, combien cet enseignement s’avère nécessaire et précieux, les demandes les plus élémentaires autant sur le plan de la santé qu’au niveau économique sont étroitement reliées à la Terre d’Israël.
Notre Matriarche Rachel, décédant sur le chemin du retour vers la Terre d’Israël, est l’inconsolée et l’inconsolable face aux épreuves que va traverser notre Peuple jusqu’à l’avènement de la Délivrance. Comme l’indique le prophète (Jérémie 31, 15-17) :
…רחל מבכה על בניה מאנה להנחם על בניה כי איננו. כה אמר ה’ מנעי קולך מבכי ועיניך מדמעה כי יש שכר לפעלתך נאם ה’ ושבו מארץ אויב. ויש תקוה לאחריתך נאם ה’ ושבו בנים לגבולם
“C’est Rachel qui pleure ses enfants, qui ne veut pas se laisser consoler de ses fils perdus ! Or, dit Ashem, que ta voix cesse de gémir et tes yeux de pleurer, car il y aura une compensation à tes efforts… ils reviendront du pays de l’ennemi. Oui, il y a de l’espoir pour ton avenir… tes enfants rentreront dans leur domaine.
Il apparait que ces deux épisodes, le décès de Rachel et la demande de la pluie s’insèrent, tous deux, dans un même souffle de voir notre Peuple retrouver sa pleine vitalité sur Sa Terre déjà bourgeonnante.
La controverse concernant la date du décès n’en est que plus émouvante quand nous prenons conscience du Retour avéré de notre Peuple au mois de Yaar justement, en célébrant son Indépendance, mais la confiance inébranlable envers notre Créateur nous pousse à ne voir dans l’hiver qui approche qu’une période de maturation avant le parachèvement du projet messianique qui consolera pleinement notre mère Patrie ! Hodesh tov !
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